La LBO et les autres méthodes d’acquisition d’une société

Les principes liés à l’acquisition d’une société par effet de levier (LBO)
Dans le cadre d’un rachat de société, trois critères principaux doivent notamment être pris en considération : le critère juridique, le critère financier et le critère fiscal.
Ces éléments conditionnent souvent le succès de la reprise, mais aussi et surtout de ses suites.
Le but de la présente fiche pratique est de présenter de manière synthétique les différents modes d’acquisition de titres de sociétés par le système dit du « levier ».
Ce système, en raison de ses nombreux avantages, connaît en effet un essor non démenti depuis plusieurs décennies.
Nous reviendrons donc sur les principes généraux en matière d’acquisition avec effet de levier, avant de faire un bref panorama des hypothèses dans lesquelles il est le plus souvent utilisé.
Les principales difficultés liées au rachat en direct d’une société cible
Dans le cadre d’un projet de rachat de titres d’une société, l’éventuel repreneur aura bien souvent recours à un financement bancaire.
Dans ce cadre, l’attention du partenaire bancaire se portera en premier lieu sur la faculté du repreneur à assumer le remboursement du financement consenti, au regard des résultats générés par la société cible.
Afin de permettre une meilleure compréhension du lecture, nous prendrons ci-dessous un exemple simple d’application.
Exemple en cas de rachat en direct :
- Une personne souhaite faire l’acquisition de l’intégralité des titres d’une société
- La valeur des titres est estimée à 1.000.000€
- Le montant du financement est égal au prix, soit 1.000.000€. Cet emprunt est consenti pour une durée de 7 ans, à un taux global de 2,5%
- Le Résultat net de la cible (présumé constant sur la période) est de 250.000€
En l’espèce, le tableau d’amortissement simplifié du financement est le suivant :
Années | Annualité | Intérêts | Amortissement du capital |
1 | 155 869,91 € | 23 489,98 € | 132 379,93 € |
2 | 155 869,91 € | 20 142,30 € | 135 727,61 € |
3 | 155 869,91 € | 16 709,96 € | 139 159,95 € |
4 | 155 869,91 € | 13 190,81 € | 142 679,10 € |
5 | 155 869,91 € | 9 582,68 € | 146 287,23 € |
6 | 155 869,91 € | 5 883,30 € | 149 986,61 € |
7 | 155 869,91 € | 2 090,37 € | 153 779,54 € |
Cumul | 91 089,43 € | 1 000 000 € |
L’acquisition de la société cible est dans cette hypothèse réalisée par l’acquéreur personne physique.
Par principe, l’acquéreur s’oblige à rembourser le financement consenti par l’intermédiaire des revenus générés par la société cible.
En l’espèce, nous éluderons l’hypothèse du versement d’une rémunération octroyée par le repreneur, le soumettant à une fiscalité ainsi qu’à des cotisations sociales particulièrement importantes. Un focus sera donc effectué sur la perception par le repreneur d’un dividende, afin de lui permettre d’honorer les annualités d’emprunt.
Or, la perception de ce dividende va soumettre le repreneur à une fiscalité à l’impôt sur le revenu, ainsi qu’aux prélèvements sociaux, soit :
- à la « flat tax », 12,8% de prélèvement forfaitaire obligatoire et de 17,2% de prélèvement sociaux ; ou
- au régime du barème progressif de l’impôt sur le revenu, après application d’un abattement de 40%, accompagné de 17,2% de prélèvement sociaux.
À titre de simplification, nous ne retiendrons ici que l’hypothèse d’une soumission au prélèvement forfaitaire unique (flat tax).
Afin de permettre le paiement de l’annualité d’emprunt (soit 155.000 € environ), la société devra donc verser à son associé unique un dividende brut d’environ 221.000 € (155.000 € / (1-30%)).
Dans cette hypothèse, la société devra donc générer un résultat net de 221.000 € et l’associé devra assumer environ 66.000 € par an d’impôt et de prélèvements sociaux afin de rembourser le financement souscrit.
En synthèse la société cible devra distribuer environ 1.560.000 € de résultat au profit de son associé (qui aura lui-même à assumer environ 460.000 € d’impositions) sur la période.
Afin de pallier cette difficulté, la pratique a développé plusieurs méthodes.
La présente fiche a ainsi pour objet de revenir sur les grands principes liés aux opérations à effet de levier (LBO).
L’optimisation de l’acquisition d’une société par le mécanisme du « leverage buy-out » (LBO)
Seuls les grands principes du LBO seront évoqués dans cette fiche. Pour plus d’informations et de détails, nous vous invitons à contacter directement l’un des Avocats de notre cabinet en charge de ces aspects.
En synthèse, le LBO est une technique d’acquisition d’une société par l’intermédiaire d’une autre société (dite société « holding ») soumise à l’impôt sur les sociétés. La société holding va alors servir de levier afin de réaliser l’opération.
Dans cette hypothèse, c’est ainsi la société holding qui va directement contracter l’emprunt et devenir propriétaire des titres de la société cible.
Au-delà des intérêts juridiques, ce mécanisme revêt un intérêt fiscal et financier certain, donc nous détaillerons les grandes lignes dans les développements suivants.
Il est en effet rappelé que les dividendes reçus par une société holding de sa société filiale sont soumis à un régime d’imposition spécifique et avantageux.
Le principe : l’application du régime mère-fille aux dividendes reçus par la société holding
Dans l’hypothèse où la société holding détient plus de 5% des titres de sa société filiale, le dividende perçu est soumis au régime « mère-fille ».
Aux termes de l’article 145 du CGI, le dividende est ainsi exonéré en totalité, sous réserve de la réintégration d’une quote-part pour frais et charge de 5%.
Ainsi, seule la quote-part de frais et charge de 5% du montant du dividende est soumise à une imposition à l’impôt sur les sociétés (en principe 25%).
Le dividende reçu de la société soumis à l’impôt sur les sociétés est donc en pratique (et sauf exception) soumis à un taux global de 1,25% (à comparer aux 30% de l’hypothèse précédente).
Le recours au LBO présente donc un premier avantage fiscal indéniable pour le repreneur, qui peut être modélisé comme suit (hors prise en considération de la déduction des intérêts du financement) :
Dans cette hypothèse, la société cible n’aura eu qu’à mobiliser 1.116.500 € afin de permettre le remboursement du financement d’acquisition, soit une économie d’environ 400.000 € par rapport à l’hypothèse d’un rachat en direct.
En complément, il convient de rappeler que la société holding est en mesure de déduire de ses résultats une partie des intérêts du financement consenti, ce qui génère en pratique une économie fiscale encore plus importante, sous conditions.
Pour plus d’informations à ce sujet, nous vous invitons à contacter nos Avocats en charge du Droit du financement.
L’option pour le régime de l’intégration fiscale
Par ailleurs, et dans certains cas, il est possible d’opter pour le régime de l’intégration fiscale. Dans ce contexte, le dividende est soumis à une quote-part de frais et charge de 1% (et non 5%).
Cela se traduit en pratique par une économie d’impôt sur la période, à relativiser cependant au vu du coût juridique, comptable et fiscal de mise en œuvre et de suivi de l’intégration fiscale.
Cette option ne possède donc un intérêt qu’en cas de prix d’acquisition particulièrement important.
Dans cette hypothèse, la différence au terme du délai de 7 ans ne se limite qu’à environ 11.000 €.
Brève analyse des variantes du LBO
L’Owner Buy Out (OBO)
Comme sa dénomination l’indique, l’OBO est une méthode permettant à un associé majoritaire de faire racheter par une société holding (dont il est aussi majoritaire) les titres de sa propre société.
En pratique, il s’agit d’une sorte de « vente à soi-même », qui va permettre à l’associé dirigeant de dégager des liquidités et, le cas échéant, d’intégrer des titres (managers, héritiers) à la société de reprise.
Le Management Buy Out (MBO)
La méthode du MBO est celle qui consiste au rachat de la société par une partie ou l’ensemble des salariés d’une entreprise. Dans ce cadre, plusieurs collaborateurs de la société (généralement membres du management) procèdent à la création d’une société holding ayant pour objet d’acquérir la société qui les emploie.
Le Buy-In Management Buy-out « BIMBO »
Le Buy In Management Buy Out (BIMBO) est une combinaison d’un MBO et d’un MBI, le MBI étant le rachat de la société par des dirigeants issus d’une autre société et des investisseurs financiers.
Dans ce cadre, les managers vont s’associer avec des investisseurs financiers ou industriels afin de procéder au rachat de la société cible.
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