Apport de titres : report ou sursis d’imposition ?
Les plus-values d’apport ou de cession de titres sont par principe soumises à l’impôt sur le revenu (150-0 A du CGI).
Toutefois, les plus-values réalisées depuis le 1er janvier 2000 à l’occasion de certaines opérations d’échanges de titres bénéficient d’un sursis d’imposition (CGI art. 150-0 B).
Institué par l’article 94 de la loi 99-1172 du 30 décembre 1999, ce régime de sursis a remplacé le dispositif de report qui existait jusque-là pour les échanges de titres réalisés à l’occasion d’une offre publique, d’une fusion, d’une scission ou d’un apport en société.
Depuis le 14 novembre 2012, les plus-values d’apport de titres à des sociétés soumises à l’IS et contrôlées par l’apporteur sont exclues du sursis d’imposition, mais relèvent d’un régime de report d’imposition automatique (CGI art. 150-0 B ter).
L’objet de la présente étude est de revenir de manière simplifiée sur les régimes du report et du sursis d’imposition en cas d’apport de titres.
Le sursis d’imposition en cas d’apport de titres
Régime antérieur au 14 novembre 2012
En cas de sursis d’imposition, l’opération est considérée comme présentant un caractère intercalaire et n’est donc pas prise en compte pour l’établissement de l’impôt sur le revenu au titre de l’année de l’échange des titres mais, lors de la cession ultérieure des titres reçus en échange, le gain réalisé est calculé à partir du prix ou de la valeur d’acquisition des titres d’origine remis à l’échange.
Les plus-values résultant des apports de titres à une société soumise à l’impôt sur les sociétés ou à un impôt étranger équivalent ne constituaient pas un gain net de cession imposable et avaient ainsi un caractère purement intercalaire.
Les plus-values qui en résultaient n’avaient donc pas à être déclarées. Elles se trouvaient placées sous un régime dit de sursis d’imposition.
Cependant, les titres nouveaux reprenaient le prix de revient fiscal des titres d’origine, la taxation évitée au moment de l’apport était donc appelée à s’opérer à la date de cession des nouveaux titres.
Certains contribuables ont tiré parti de ce dispositif pour effacer l’imposition de la plus-value afférente à des titres en phase de cession par une opération simple :
- les titres étaient apportés à une nouvelle société, la plus-value était alors placée en sursis d’imposition ;
- les titres reçus étaient alors cédés, sans plus-value, par la société à laquelle ils venaient d’être apportés.
Cette opération a été regardée (et sanctionnée) comme abusive par le Conseil d’Etat, sauf remploi par la société cédante d’une fraction significative du produit de la cession dans l’acquisition d’autres titres d’entreprise.
La loi est donc venue encadrer cette pratique de « l’apport-cession ». Ainsi, l’article 150-0 B ter prévoit que, dès l’instant que le contribuable détient, à l’issue de l’apport, la majorité des droits de vote de la société à laquelle il a apporté ses titres, la plus-value d’apport doit être déclarée et se trouve soumise à un report d’imposition.
Régime postérieur au 14 novembre 2012
Depuis le 14 novembre 2012, l’imposition des plus-values réalisées à l’occasion d’un apport de titres à une société soumise à l’impôt sur les sociétés, et contrôlée par l’apporteur, est soumise à un régime de report d’imposition.
Toutefois, si l’apport réalisé n’a pas pour effet de donner le contrôle de la société bénéficiaire à l’apporteur, le régime du sursis d’imposition de la plus-value afférente à cet apport s’applique (art. 150-0 B et 150-0 D ter, 9° du CGI).
Le report d’imposition en cas d’apport de titres
Les plus-values d’échange de titres réalisés à compter du 14 novembre 2012 à l’occasion d’un apport à une société contrôlée par l’apporteur, sont exclues du sursis d’imposition et soumises à un régime de report d’imposition automatique prévu à l’article 150-0 B ter du CGI.
Les prélèvements sociaux applicables sont eux-aussi soumis au régime du report d’imposition.
Conditions d’application du régime du report d’imposition
Les règles sont en grande partie les mêmes que celles relatives au sursis d’imposition.
L’apport doit être réalisé à une société soumise à l’impôt sur les sociétés.
La société bénéficiaire de l’apport doit être contrôlée par le contribuable (dans le cas contraire, la plus-value est soumise au mécanisme du sursis d’imposition). Cette condition est appréciée à la date de l’apport, en tenant compte des droits détenus par le contribuable à l’issue de celui-ci.
Les apports avec soulte sont immédiatement imposables lorsque le montant de la soulte reçue excède 10 % de la valeur nominale des titres reçus.
Fin du report d’imposition
Le report d’imposition prend fin lors de la cession à titre onéreux, du rachat, du remboursement ou de l’annulation des titres reçus en rémunération de l’apport, ou des parts ou droits dans les sociétés ou groupements interposés.
L’apport des titres à une société soumise à l’impôt sur les sociétés ne met toutefois pas fin au report.
Il n’est ainsi mis fin au report d’imposition qu’à proportion des titres cédés à titre onéreux, rachetés, remboursés ou annulés.
Obligations déclaratives
Le contribuable doit indiquer le montant de la plus-value en report (ou des plus-values en report en cas d’apports successifs) sur la déclaration d’ensemble des revenus.
En cas de donation (ou de don manuel) des titres reçus en rémunération de l’apport, le donataire mentionne dans la proportion des titres transmis le montant de la plus-value en report dans la déclaration d’ensemble des revenus si la société bénéficiaire de l’apport est contrôlée par le donataire.
Synthèse
Régime d’imposition classique à l’IR (150-0 A du CGI) | Régime du sursis d’imposition (150-0 B du CGI) | Régime du report d’imposition (150-0 B ter du CGI) | |
Antérieurement au 14 novembre 2012 | apport à une société non soumise à l’IS ou ne répondant pas aux conditions fixées pour le sursis ou le report d’imposition | apport à une société soumise à l’IS non contrôlée par l’apporteur | / |
Postérieurement au 14 novembre 2012 | apport à une société non soumise à l’IS ou ne répondant pas aux conditions fixées pour le sursis ou le report d’imposition | apport à une société soumise à l’IS non contrôlée par l’apporteur | apport à une société soumise à l’IS + apporteur détient le contrôle de la société |
Aller plus loin
ZRR, rappel des conditions d’exonération
Publié le 07 juin 2023
Valorisation de l’usufruit, rappel des principes
Publié le 07 juin 2023
Usufruit, nue-propriété, retour sur les principes du démembrement de propriété
Publié le 04 septembre 2023